Saint Bonaventure en 1263 instaura cette fête pour les Franciscains et le pape Urbain VI la généralisera à toute l’église en 1379. Autrefois, on la célébrait le 2 juillet, conformément à l’Évangile de Luc qui rapporte que Marie serait restée chez Elisabeth jusqu’à la naissance de Jean le Baptiste (et en supposant qu’elle y soit restée les huit jours supplémentaires correspondant aux rites de l’imposition du nom). 

Après la réforme liturgique du Concile Vatican II, la fête fut fixée au 31 mai, à la fin du mois consacré à Marie, mettant ainsi en valeur la confiance et la joie de Marie envers le projet de Dieu. 

On fête donc la visitation le 31 mai.

Elle est aussi fêtée par les orthodoxes le 30 mars.

Qu’est-ce que la Visitation de la Vierge Marie ?

La Visitation est une fête mariale qui commémore la visite de Marie à sa cousine Elisabeth peu de temps après avoir appris de l’ange Gabriel qu’elle allait enfanter Jésus, le fils de Dieu.

Nous retrouvons cet épisode biblique dans l’Évangile de Luc (chapitre 1). L’évangéliste commence son récit en narrant deux événements analogues : l’annonce par l’ange Gabriel de deux grossesses miraculeuses. 

La première se déroule au sein du couple formé par Zacharie, un prêtre juif, et Élisabeth. Tous deux avancés en âge, ils regrettent de ne pas avoir d’enfant car Élisabeth est stérile. Alors qu’il est au temple, le messager céleste se présente à Zacharie et le prévient que sa femme tombera bientôt enceinte d’un garçon qu’ils devront prénommer Jean et qui aura pour vocation de préparer le peuple de Dieu à l’arrivée du Seigneur.

Puis, l’ange Gabriel se présente à Marie, une jeune vierge vivant à Nazareth. Il la prévient du projet que Dieu a pour elle : fécondée par l’Esprit Saint, elle portera son enfant. Il lui annonce également que sa cousine Élisabeth est enceinte de six mois, preuve irréfutable de la puissance du Très-Haut.

C’est alors qu’avec empressement, Marie se met en route pour la Judée où réside le couple. Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.

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Quand Élisabeth entendit la salutation de Marie, l’enfant tressaillit en elle. Alors, Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint, et s’écria d’une voix forte : ‘’Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? Car, lorsque tes paroles de salutation sont parvenues à mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en moi. Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur.’’

Lc 1, 41-45

Quel est le sens spirituel de la Visitation ?

L’épisode de la Visitation relate la rencontre entre l’Ancien et le Nouveau Testament, et l’Alliance renouvelée entre Dieu et les humains.

D’abord, la Visitation raconte l’arrivée au monde prochaine, et miraculeuse, de deux enfants : le prophète Jean Baptiste et le Sauveur Jésus. En effet, cet épisode qui narre la rencontre entre deux femmes rendues fécondes par la puissance de Dieu, confirme la vocation de ces deux garçons et, donc, le projet de Dieu.

L’accomplissement des temps : Dieu s’est fait chair

À l’arrivée de Marie, Élisabeth sent son fils Jean Baptiste tressaillir dans son ventre et se sent soudain remplie de l’Esprit Saint. Elle reconnaît en la jeune juive « la mère de [s]on Seigneur » qui « a cru en l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur ».

En désignant haut et fort Marie comme « celle qui a cru », Élisabeth est placée par Luc comme porte-parole de Dieu. Âgée, elle représente l’histoire du peuple d’Israël, l’Ancienne Alliance qui reconnaît que la promesse de Dieu est sur le point de s’accomplir. D’ailleurs, son rôle est d’enfanter le dernier prophète dont la vocation est de préparer et d’annoncer la venue du Messie.  

Le Magnificat 

À la salutation d’Élisabeth : « Tu es bénie entre toutes les femmes », Marie, exultant dans l’Esprit Saint, magnifia le Seigneur par un chant de louange, le cantique du Magnificat.

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Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom ! Sa miséricorde s’étend d’âge en âge sur ceux qui le craignent. Déployant la force de son bras, il disperse les superbes. Il renverse les puissants de leurs trônes, il élève les humbles. Il comble de biens les affamés, renvoie les riches les mains vides. Il relève Israël son serviteur, il se souvient de son amour, de la promesse faite à nos pères, en faveur d’Abraham et sa descendance à jamais.

Lc 1, 46-55

D’après le jésuite Michel Farin, ce cantique est composé de plusieurs morceaux et chants issus de l’Ancien Testament. D’après lui, Marie qui a cru, c’est-à-dire qui a la foi et qui l’exprime en louant le Seigneur, indique la victoire de Dieu sur la méfiance de l’humanité. 

Le portrait des vertus théologales

Par ce mouvement d’amitié et de solidarité envers sa cousine, Marie explicite ce projet de Dieu pour nous : c’est une invitation à la charité attentive envers l’autre, et la foi dans la mission du Christ. 

La rencontre entre ces deux femmes qui accueillent en leur sein ces promesses de vie font le portrait des vertus théologales : 

    • la foi, soit la disposition à croire aux vérités révélées, 
    • l’espérance, la disposition à espérer la béatitude, 
    • et la charité, c’est à dire l’amour de Dieu et de son prochain.

Méditation de Mgr Jacques Habert

Évêque du diocèse de Séez, et aussi l’évêque accompagnateur de l’Association des œuvres mariales (AOM). 

C’est un mystère joyeux que l’Église nous invite à célébrer en ce 31 mai, une fête qui vient aussi conclure le « mois de Marie ». Toute dévotion mariale doit nous renvoyer à notre appartenance à l’Église et à notre vie chrétienne au quotidien. Le mystère de la Visitation en est une belle illustration. En effet, une façon traditionnelle de présenter la mission de l’Église est de dire précisément qu’elle accomplit une triple mission : annoncer l’évangile, célébrer Dieu et servir les pauvres.

Dans l’évangile de la Visitation nous contemplons la Vierge Marie. Elle accomplit de façon étonnante et unique cette triple mission :

    • Marie annonce la bonne nouvelle. C’est le sens de sa visite chez sa cousine Élisabeth qui s’écrit : « D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » Cette annonce est accueillie avec une grande joie. C’est la joie d’Élisabeth, la joie de Marie, la joie mystérieuse aussi de Jean-Baptiste dans le sein de sa mère.
    • Marie célèbre son Dieu. C’est la proclamation du magnificat : « Mon âme exalte le Seigneur. » Cette prière deviendra la prière de l’Église tous les soirs à l’office des vêpres.
    • Marie se met aussi au service. Discrètement l’évangile nous l’indique : « Marie resta avec Élisabeth environ trois mois. »

On comprend mieux pourquoi, lors du Concile Vatican II, les pères conciliaires ont décidé que le développement sur la Vierge Marie serait intégré à la constitution présentant le mystère de l’Église. En effet en contemplant Marie, on découvre en vérité quelle est la mission de l’Église. Celui qui veut comprendre ce qu’est l’Église doit se tourner vers Marie.

Que cette fête de la Visitation nous renvoie à ces trois missions que chacun reçoit le jour de son baptême : Comment, à l’image de Marie, j’annonce le Seigneur à mes frères ? Comment, à l’image de Marie, je loue le Seigneur ? Comment, à l’image de Marie, je me mets au service des autres ?

Voilà une bonne méditation en ce jour de la Visitation. Comme toute méditation elle nous renvoie à une mise en pratique concrète. Si nous vivons cela alors certainement nous goûterons nous aussi à la joie de l’évangile.

+ Jacques Habert, évêque du diocèse de Séez